Et si la soirée organisée par les Éditions Gallimard et l’Hôtel Littéraire Gustave Flaubert ce 14 décembre autour de l’édition chez Folio du remarquable livre de Jean Louis Cabanès était le signe d’un retour en grâce des frères Goncourt ?
Longtemps ramenés au prix littéraire qui porte leur nom, ils ont souffert du caractère gigantesque et touffu de leur journal, voire de la reprise hors contexte et hors appareil critique de citations tronquées ou même fautives. Si l’on ajoute à cela des personnalités clivantes, des romans tombés dans l’oubli (autre injustice), on comprendra qu’il fallait bien toute la complexe affection de Flaubert pour entamer cette tâche de réhabilitation.
Avec la version présentée par Folio, on peut enfin accéder au meilleur :
Du portrait définitif de Napoléon III à la description des prisons de femmes, du rapport minutieux et inoubliable de la première rencontre avec George Sand, l’essentiel, le meilleur du journal est là. Des japonaiseries au culte du XVIIIème, de la haine de la Commune au rejet des horreurs de la répression versaillaise, on ne peut qu’être séduit par cette démarche qui rend accessible un monument injustement traité de la littérature française.
Libre à chacun de poursuivre la découverte des frères Goncourt, avec la globalité des tomes et avec les romans (trop peu réédités).
Et ce même s’il vous manquera d’avoir assisté à l’échange gourmand et passionnant entre une éditrice hors pair, Blanche Cerquiglini, directrice des éditions Folio classique, et le lumineux professeur Jean-Louis Cabanès qui, avec son épouse, ont passé des années à parcourir le monde à la recherche des manuscrits qui donneraient la version la plus fidèle du texte.
Comment ne pas évoquer pour finir en cette année Proust, le formidable pastiche que, dans Le Temps retrouvé, Proust a écrit pour décrire une soirée chez les Verdurin ?
Au moins pour Proust et Flaubert, il faut lire le Journal des frères Goncourt.
Jacques Letertre