La lecture est idéale pour l’évasion mais pour atteindre ce but, il n’est pas nécessaire de recourir uniquement au genre du roman, de la poésie ou du policier. Les dictionnaires, les annuaires, les indicateurs horaires ou encore la consultation de cartes en ont passionné plus d’un et peuvent suffire à vous faire voyager de la façon la plus agréable.

  C’est le cas de Charles Swann dans La Recherche du temps perdu de Marcel Proust, où notre héros, amoureux jaloux d’Odette, suit fiévreusement les traces de sa volage maîtresse sur un indicateur de chemins de fer : « Mais quand elle était partie pour Dreux ou pour Pierrefonds — hélas, sans lui permettre d’y aller, comme par hasard, de son côté, car « cela ferait un effet déplorable », disait-elle — il se plongeait dans le plus enivrant des romans d’amour, l’indicateur des chemins de fer, qui lui apprenait les moyens de la rejoindre, l’après-midi, le soir, ce matin même ! » Marcel Proust, Du côté de chez Swann.

  On pense aussi au héros de Jules Verne dans Le Tour du monde en quatre-vingt jours, Phileas Fogg, lisant quotidiennement et si attentivement les journaux à son Reform-Club de Londres qu’il arriva à retenir par cœur dans le Morning-Chronicle tous les détails nécessaires pour lancer son célèbre pari et s’embarquer le soir même pour son audacieux voyage, avec le Bradshaw’s continental railway steam transit and general guide sous le bras.

 

Phileas Fogg dans Le Tour du monde en quatre-vingt jours de Jules Verne. Illustration Alphonse de Neuville. Collection Hetzel.

 

  A leur suite, nous vous proposons une découverte virtuelle de la ville de Rouen « Sur les pas de Gustave Flaubert » grâce à un plan historique que nous avons préparé avec l’aide précieuse d’Yvan Leclerc, éminent spécialiste flaubertien qui nous a assisté de ses précieux conseils. En 2021 aura lieu le bicentenaire de la naissance de Flaubert qui sera l’occasion de festivités toutes particulières à Rouen avec de nombreux événements préparés par la ville et la Société des Amis de Flaubert, dont des conférences, des expositions et des circuits découvertes dans la ville. L’Hôtel Littéraire Gustave Flaubert ne manquera pas d’y participer et met d’ores et déjà ce plan à la disposition de tous les visiteurs.

  Sur cette carte historique de Rouen datée de 1871, dénichée et entièrement conçue par la graphiste Ursula Held avec les textes que nous lui avons fourni, il nous a semblé souhaitable d’élargir l’horizon flaubertien en ajoutant certaines personnalités illustres de la ville susceptibles d’intéresser les visiteurs ainsi que l’ensemble des lieux importants de Rouen, même sans rapport direct avec notre écrivain afin de donner un aperçu le plus complet possible du patrimoine culturel de la ville.

 

 

Carte historique de Rouen, “Sur les pas de Gustave Flaubert”

Commençons par le grand homme en vous guidant sur les lieux où il est né, l’ancien Hôtel-Dieu devenu Musée Flaubert et d’histoire de la médecine puis ses adresses rouennaises successives jusqu’au fameux pavillon de Croisset situé un peu en dehors de Rouen, sur les hauteurs, où nombre d’illustres hôtes sont venus visiter « l’ermite de Croisset », à l’instar de George Sand, Ivan Tourgueniev, Guy de Maupassant ou les frères Goncourt.

  Nous avons intégré trois adresses « modernes » de Flaubert, à savoir les lieux où sa mémoire est entretenue par des passionnés qui organisent visites, colloques, conférences, signatures de livres et projets culturels : la Société des Amis de Flaubert et de Maupassant, présidée par Yvan Leclerc dont les réunions ont lieu à l’Hôtel des Sociétés Savantes rue Beauvoisine, l’Hôtel Littéraire Gustave Flaubert rue du Vieux-Palais et la librairie d’Elisabeth Brunet rue de la Ganterie qui propose des éditions rares pour les bibliophiles.

  Une deuxième section explore les lieux fréquentés par Flaubert enfant et adolescent, à partir du Collège royal devenu le Lycée Corneille, en passant chez quelques amis chers comme Louis Bouilhet, ou par les lieux dédiés à sa mémoire comme la bibliothèque patrimoniale de Canteleu où se trouvent nombre de ses manuscrits et la place des Carmes sur laquelle se dresse sa statue en bronze, dont la majestueuse réplique en plâtre est visible dans l’hôtel Flaubert.

 

 

  Nous vous détaillons ensuite différents lieux littéraires flaubertiens qui ont inspiré l’écrivain comme la cathédrale Notre-Dame, lieu de la rencontre d’Emma et de Léon dans Madame Bovary, qui abrite les tympans d’Hérodias et les vitraux de La Légende de saint Julien L’Hospitalier. On pense aussi rendre une visite au Museum d’Histoire Naturelle pour se lancer à la recherche du perroquet Loulou, héros d’Un Cœur simple, dont un autre exemplaire est également empaillé au Musée Flaubert –  à ce sujet, lire absolument la savoureuse enquête de Julian Barnes, Le perroquet de Flaubert, Stock, 1984 – ou pour ceux qui préfèrent Carthage et Salammbô, courir admirer les intéressantes collections du Musée des Antiquités.

 

 

  Impossible de résister au plaisir de restituer le parcours du fiacre d’Emma Bovary qui sillonne la ville alors que l’héroïne est abandonnée aux caresses de son amant Léon au rythme du galop des chevaux dans une scène mythique du roman et dont le tracé a été minutieusement reconstitué par l’université de Rouen.

  Il eut été dommage de ne ne pas citer les adresses de personnalités illustres de Rouen comme Maurice Leblanc, père d’Arsène Lupin, le dramaturge Pierre Corneille ou le romancier Pierre Mac Orlan qui ont tous plus ou moins assidûment fréquenté la ville, au même titre que Fontenelle, Alain ou encore André Gide.

  Un mot sur les principaux monuments de la ville “non flaubertiens” qui méritent le détour, à commencer par l’Abbatiale St Ouen, la mystérieuse aître Saint-Maclou, le Gros Horloge, ou encore la Maison des Quatre Fils Aymon  – dont le nom est cher aux lecteurs de ce très beau roman de chevalerie du Moyen-Âge, transformée en Musée de l’éducation.

  De nombreuses excursions sont possibles aux alentours de Rouen vers Trouville, fréquentée par Flaubert dans sa jeunesse et où il rencontra son grand amour, Elisa Schlésinger, les villes rivales de Ry et Lyons-la-forêt qui se disputent l’honneur d’être le modèle de Yonville-l’abbaye de Madame Bovary, ou encore Pont-L’Évêque, théâtre de l’action d’Un cœur simple.

  Nous ne résistons pas au plaisir de vous citer le début du premier des Trois Contes, où il confirmé que Flaubert avait le génie de l’incipit :

“Pendant un demi-siècle, les bourgeoises de Pont-l’Évêque envièrent à Madame Aubain sa servante Félicité.”

 

 

 

Nous vous souhaitons une bonne promenade virtuelle, en attendant d’arpenter les rues plus librement avec notre plan à la main !  Lien vers la carte historique “Sur les pas de Gustave Flaubert”